mardi 19 juillet 2011

Mediterranea : une revue d'art sur la Côte d'Azur pendant l'entre-deux guerres

Mediterranea, revue d'art, et surtout revue culturelle au sens large, ne cherche pas à réformer les lettres et les arts, mais elle accomplit une véritable prouesse durant ses années de parution à Nice, entre 1926 et 1940 : malgré la faible réceptivité locale, elle parvient à maintenir un niveau de grande qualité avec des textes inédits, des illustrations originales d'après gravures, des numéros spéciaux qui demeurent des références, tels que celui consacré en mars 1929 au poète Armand Godoy (La Havane, 1880 - Paris, 1964), avec la participation de cent quinze écrivains et artistes, parmi lesquels Henri de Régnier, Vincent d'Indy, Francis Jammes, Paul Fort, Valéry Larbaud. Ce numéro mémorable titre alors Mediterranea, la plus luxueuse des revues de la Riviera française. Luxe de présentation, bien sûr, mais surtout luxe de talent et de persévérance de son fondateur, Paul François Castela (1893 - 1966). Ainsi, en janvier 1936, c'est un numéro spécial consacré à l'écrivain roumain Panaït Istrati (1884 - 1935), le "Gorki des Balkans", qui fait à son tour référence (fonds spécifique à la BU Lettres de Nice). En 1937, une place d'honneur est accordée à J.H. Rosny aîné (1856 - 1940) - l'auteur de La Guerre du feu (seul exemplaire numérisé actuellement dans Gallica).

Grâce à une collaboration soutenue avec de brillants journalistes, chroniqueurs, écrivains et graveurs sur bois, Mediterranea dépasse largement l'audience régionale pour atteindre une véritable notoriété, dont témoigne notamment le soutien de plusieurs membres de l'Académie Française. Une fidélité constante à la Provence et l'ouverture vers la culture méditerranéenne, marquée par une enquête lancée en 1927 sur "l'esprit méditerranéen", font de Mediterranea une qualité de plus. La richesse des ses contenus littéraires et illustrés a émergé lors d'un dépouillement très significatif que j'ai effectué en 2010. La synthèse réalisée a fait l'objet d'une communication lors du colloque organisé à Nice par les Universités de Haïfa et de Nice Sophia Antipolis (CMMC), les 13 et 14 janvier 2011, sur le thème Pour une histoire des médias en Méditerranée, XVIe-XXe siècles (introduction du colloque par Pierre-Yves Beaurepaire et Ouzi Elyada, publication prévue en décembre 2012).

Cette revue, aujourd'hui oubliée, fut unique en son genre sur la Côte d'Azur et bien au-delà : elle mérite d'être à nouveau connue et reconnue.
Que force d'oubli devienne force de mémoire.

Contact : Dominique.Laredo@unice.fr